Thiers est la capitale historique et économique de la coutellerie française depuis près de 800 ans. Déjà en l’an 1220, on identifiait à Thiers une quarantaine d’ateliers de coutellerie, ce qui laisse imaginer que l’implantation de l’activité coutelière date du début du XIIIsiècle.

Au cours de son histoire, la coutellerie thiernoise a vécu des dates et des périodes très importantes, en particulier ses jurandes : « Chartes corporatives qui permettaient de réglementer la profession par l’élaboration d’une trentaine d’articles, définissant le territoire, l’identification des couteliers (table des marques), la morale professionnelle , la qualité de la fabrication. »

La première Jurande date de 1582, établie par lettre de patente du roi Henri lll.
La seconde Jurande date de 1614, établie par lettre de patente du roi Louis Xlll.
La troisième Jurande date de 1743 sous Louis XV, elle agrandit la zone géographique de production à une douzaine de communes périphériques de la montagne thiernoise. Thiers devient un bassin de production de coutellerie.

Le XIXe siècle voit l’explosion de l’élaboration, de la créativité et de la commercialisation de la coutellerie thiernoise. L’optimisation des coûts de fabrication, par la spécialisation de certaines entreprises dans diverses opérations et rangs de production (forge, découpage des métaux, trempe, émouture, polissage, façonnage de manches…) permettent le véritable chaînage de la production coutelière, où tous les sous-éléments ouvragés du couteau terminent leur périple dans une entreprise fabricante qui assemble les diverses pièces du couteau, finit sa création, pour ensuite le commercialiser.

Ce process de fabrication, échafaudé à Thiers, est toute la différence entre une ville coutelière, où l’on trouve une ou quelques entreprises fabricantes de couteaux, et un bassin coutelier, où se superpose ce maillage d’entreprises, fabricantes et sous-traitantes.

C’est aussi au XIXe siècle que les couteliers se couplent avec ce que l’on appelle les marchands, sorte d’entreprises de vente, proches de nos grossistes d’aujourd’hui. Ils mettent en concurrence les couteliers afin de tirer les prix en leur faveur, développent énormément la commercialisation d’une grande partie de la production coutelière thiernoise et, par l’intermédiaire de leurs réseaux, organisés et performants, ils diffusent abondamment la coutellerie thiernoise en France, ainsi que dans le monde entier.

Dans la première moitié du XXe siècle, la coutellerie thiernoise emploie plus de 16 000 personnes, à travers 300 à 400 entreprises fabricantes de couteaux fermants, couteaux pour la chasse, couteaux pour la table ou le ménage, couteaux à découper pour les professionnels (métiers de bouche, agriculteurs, électriciens, vétérinaires, vignerons), couteaux publicitaires, articles dits détournés (pelles à tarte, éplucheurs), ciseaux, coupe-volailles, sécateurs, lames spécifiques pour appareils ménagers… Se sont rajoutées de nombreuses entreprises approvisionneuses pour la coutellerie, ou assurant la maintenance ou la modernisation de la production.

On parle alors de filière coutelière thiernoise dans laquelle se trouvent des entreprises de :

  • Construction de machines-outils, spécifiques à la coutellerie,
  • Maintenance ou mécanisation et automatisation pour l’outil de production,
  • Fabrication de petits matériels et produits servant aux diverses opérations d’élaboration du couteau : polissoirs, pâtes à polir, rivets, visserie…,
  • Des manufactures d’emballages, propres à la coutellerie : cartons, boîtes pour couteaux, écrins, étuis, présentoirs, emballages thermoformés…,
  • Des dépôts ventes de matières premières : acier, bois, corne, matière plastique… et autres fournitures.

Après 1945, certaines entreprises de la filière coutelière thiernoise opèrent une mutation technologique importante, elles se servent de leur savoir-faire, ainsi que de leur équipement en machines outils pour s’orienter vers des activités :

  • De forges, de découpage des métaux, ou d’injection plastique, pour : l’automobile, l’armement, l’aéronautique, l’accastillage, la pièce industrielle, la chaussure plastique, le petit matériel de bureau, les pièces d’équipement pour l’électrique, l’électronique, où l’agricole.
  • De construction mécanique, de maintenance et de mécanique d’usinage pour la production de machines pour l’agroalimentaire, la production de produits de consommation, la reprise mécanique de pièces industrielles,

A la fin du XXe et au début du XXIe siècle, la coutellerie thiernoise et ses industries connexes subissent, comme la majeure partie de l’occident, la mondialisation et son lot de fermetures d’entreprises et de licenciements de personnels. Les manufactures de couteaux, industrie de main-d’oeuvre s’il en est, ne sont pas épargnées. On compte aujourd’hui sur le bassin thiernois : 80 unités de productions et environ 30 de sous-traitance. Les couteliers thiernois, après cette crise industrielle majeure, ont redressé la tête pour pérenniser ce qui caractérise leurs racines sentimentales, culturelles et économiques : LE COUTEAU.

La ville de Thiers et la profession coutelière, auront su, pour se développer et se promouvoir, créer :

  • Un musée de la coutellerie,
  • Un festival “Coutellia“, le plus important, exclusivement dédié au couteau, en France, voire au monde,
  • Une formation coutelière CFA, débouchant sur un diplôme,
  • Un couteau collectif “Le Thiers®” réglementé par une Jurande, inspiré de l’histoire. Il n’y a pas d’exemple mondial d‘une telle initiative,
  • Une marque collective : “Esprit de Thiers“,
  • Et, aujourd’hui, les Rencontres Mondiales des Capitales de la Coutellerie.
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